Rencontre avec Najwa Alwan

Rencontre avec la comédienne libanaise Najwa Alwan de passage à Marseille

Najwa Alwan © Marie-Hélène Bastianelli





Lors de son précédent séjour à Marseille, elle nous avait offert une lecture à domicile avec des textes d'auteurs du Moyen-Orient (Andrée Chédid, Elias Khoury, Rabih Alameddine, Rabee Jaber, Chabname Zariab).







Cette fois-ci, tu as choisi des poèmes déclamés ou chantés en arabe, du poète syrien Nizar Kabbani et de Mahmoud Darwiche, le poète palestinien, pourquoi ce choix ?
Mahmoud Darwiche, c'est très nostalgique pour moi, j'ai grandi avec ses poèmes. Pendant la guerre Marcel Khalifé les avait mis en musique et on l'écoutait chanter sans arrêt. Chez Nizar Kabbani, j'ai choisi "Kalimat" et je termine avec "Beyrouth". Je n'ai lu que quelques traductions, c'est difficile de retrouver dans une traduction les sensations que procure la langue arabe.

Tu es Libanaise, tu as vécu longtemps en Syrie, peux-tu nous parler de ta relation à ces deux pays ?
J'ai des racines familiales en Syrie du côté de ma mère. Alors, nous y sommes allés en 1976, au début de la guerre, pendant un an. Nous y sommes retournés en 1982. Ma famille est revenue au Liban en 1990, moi j'ai fait des allers-retours. Je suis restée à Damas jusqu'à la fin 2010.
Ces deux pays sont les miens. Après la guerre au Liban, la guerre en Syrie, c'est comme si nous étions dans un cercle qui roule sur lui-même, comme s'il n'y avait pas d'hier, pas de demain.

Quelle a été ton activité en Syrie et maintenant au Liban ?
J'étais comédienne à Damas dans un théâtre subventionné, j'ai joué le répertoire international, Shakespeare, Molière, Tchékhov, Dario Fo, et les auteurs arabes bien sûr comme le dramaturge syrien Saad Allah Wannous ou le libanais Georges Schehadé. J'ai aussi travaillé dans des maisons de production privées, à la télévision, à la radio, dans des émissions ou comme doublure vocale dans des feuilletons.
Et puis, il y a la lecture de textes, de poèmes. C'était une idée de ma sœur Maha, nous avions choisi des textes ensemble. Cette forme d'expression me touche de manière intime. À Marseille, pour la première fois j'ai fait ces lectures à domicile, ce type de rencontre me plaît, cela crée une relation plus intime avec les spectateurs, avec les gens.

Tu as dédié la soirée à la mémoire de ta sœur Maha qui est décédée en 2012...
Oui, même si c'est douloureux, j'aime parler de ma sœur parce que je suis fière d'elle. Malgré toutes les difficultés, elle a réussi à créer un Centre culturel francophone à Mtein, notre village, avec la seule aide de l'association "Maison de Sagesse". Elle a d'abord rassemblé des livres qu'elle a mis à la disposition du public. Au départ, ça se passait dans notre maison familiale ; au bout de quatre ans, la municipalité a mis un local à la disposition de ce qui est devenu la Bibliothèque publique de Mtein. Après la mort de ma sœur, la municipalité a mis une grande plaque avec la photo de Maha sous laquelle c'est écrit "La Salle de Maha Alwan".

Ta sœur Nassim, qui était l'invitée du COBIAC en 2012, est conteuse...
Oui, nous sommes toutes les trois dans la culture, Maha a fait Histoire de l'Art à la Sorbonne, Nassim et moi vons fait l'Institut Supérieur des Arts Dramatiques de Damas. Aujourd'hui nous sommes toutes les deux responsables de la bibliothèque à la demande du ministère de la culture et de M. Zouheir Bou Nader de la municipalité de Mtein.

C'est ton deuxième séjour à Marseille, comment ressens-tu cette ville ?
C'est une ville très belle, elle me rappelle Beyrouth. Je me sens chez moi, pas seulement à cause de la mer, c'est autre chose, la rue, les visages… Même au théâtre, je suis allée voir "Bérénice" à la Minoterie, j'ai regardé les spectateurs, j'avais l'impression de les connaître.

Marseille, le 9 février 2014
Propos recueillis par Liliane Nasser

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